Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Naissance de la Franc-maçonnerie.

Pour sortir des contre-vérités londoniennes et parisiennes.

Après trois siècles de délires principalement orchestrés par la Grande Loge Unie d'Angleterre qui a tout fait pour s'octroyer le fondation et la structuration de la Franc-maçonnerie moderne, comme tombée du ciel le 24 juin 1717 à l'auberge de "L'oie et le Grill", ces légendes sont aujourd'hui totalement annihilées.

La Franc-maçonnerie régulière d'aujourd'hui est bien l'héritière, via l'Ecosse, des tailleurs de pierre médiévaux (je ne parle évidemment pas des pseudo-maçonneries francocentrées qui ne sont que le fruit de la récupération, par Napoléon Bonaparte, des lambeaux d'un réseau désaffecté et remis au service de la politique et de l'idéologie d'abord impériale puis républicaine).

 

A la fin du 16ème siècle, les Loges des "Maçons opératifs" ont quasiment disparu partout en Europe suite à la pénurie des grands chantiers religieux (notamment les cathédrales gothiques).

Les Francs-maçons opératifs étaient devenus une corporation de métier de haut niveau dès la fin de l'époque romane alors que c'étaient les moines qui construisaient leur monastère (et formaient par ailleurs des maçons qui allaient prendre le relais par la suite). Le basculement du "moine" vers le "curé", du monastère (roman) vers la cathédrale (gothique) allait induire la formation des corporations de bâtisseurs qui voulaient préserver leur savoir-faire, leur métier (contre les maçons qui construisaient des bâtiments profanes (moins rentables et souvent faits d'assemblage de pierres sèches de piètre qualité et non taillées) et leurs "frères" en imitant, en quelque sorte, les chapitres monastiques et en institutionnalisant des rites d'initiation et de reconnaissance mutuelle (ces artisans voyageaient beaucoup d'un chantier à l'autre et jouissaient donc d'une "liberté de passage" s'ils pouvaient prouver leur qualité d'initié au métier).

 

Mais après la fin du 15ème siècle, la Renaissance "évacue" la style gothique et se penche plutôt sur les bâtiments profanes. Les Loges périclitent partout en Europe (en Espagne, par exemple, la pierre taillée est remplacée par la brique, moins coûteuse et industrialisée) … sauf en Ecosse qui, pays de traditions profondes et fort ancrées, continue de construire en pierre rouge assez friable, mais abondante et garde ses Loges en vie et au travail, dont celles, fameuses le la "Mother Lodge of Scotland" à Kilwinning (sans numéro Loge-mère de toutes les Loges) et de la "Saint mary Chapel Loge" n°1 d'Edimbourg. Toutes ses archives brûleront dans un incendie mais leur mémoire fut ressuscitée, à la fin du 16ème siècle, par William Schaw, grand maître des bâtiments du Roi, qui en profita pour doter cette Franc-maçonnerie écossaise renaissante de règlements généraux, de la tradition du "mot sacré" et de la récitation des rituels "de mémoire". La  est la Saint Mary Chapel Loge n°0 à Kilwinning en Ecosse. Elle avait été crée, dit-on, par des moines français, probablement au 14ème siècle.

 

A partir de ce moment, la Franc-maçonnerie commence à intéresser des non-maçons qui s'y font initier comme "Maçons acceptés", souvent des nobles ou des "penseurs marginaux (alchimistes, Rose+Croix, kabbalistes, …) intrigués par les "secrets maçonniques" ou fuyant les guerres de religion qui s'amplifiaient partout entre catholicisme, anglicanisme et protestantisme. Depuis longtemps, les "Anciens Devoirs" des Francs-maçons (cfr. manuscrit Regius ou Cook) enjoignaient ceux-ci de respecter les lois et de pratiquer la religion de la contrée où on leur permettait de travailler en paix – cela induisit donc une spiritualité maçonnique non pas contre, mais au-dessus des religions).

Il est intéressant de noter que le même William Schaw est aussi un des fondateurs de la célèbre "Royal Society" de Londres dont bien des membres devinrent Maçons, notamment le protestant français Jean-Théophile Desaguliers qui fut l'instigateur de la Grandes Loge de Londres et Westminster en 1721 (qui s'intègrera à la Grande Loge Unie d'Angleterre en 1813 après la fin de la querelle entre les "Ancients" (les Loges de York, d'Ecosse et d'Irlande) et les "Moderns" (les Loges de Londres et celles qu'elles avaient fondées un peu partout).

 

Desaguliers, contemporain de Newton, secrétaire de la Royal Society, astronome de renom (c'est lui qui repère le passage de la comète de Halley en 1758, confirmant ainsi la loi de la gravitation de Newton) décide donc, en 1721, de créer la Grande Loge de Londres et Westminster avec, comme arrière-pensée, de créer un réseau au service de la science et de la raison, au-delà de toutes les religions, dans le pur esprit des "Lumières" naissantes … mais loin des fondements de la Franc-maçonnerie authentique héritée d'Ecosse dont l'essence n'est ni philosophique, ni philanthropique (sauf en créant des caisses d'entraide, des "troncs de la veuve", et en instituant des écoles d'apprentissage), mais clairement spirituelle. Il recrute un pasteur, James Anderson, pour écrire les "Constitutions" de cette Franc-maçonnerie dont il rêve. Elles paraîtront en 1723 (en y inventant, de toutes pièces, la fondation de la première grande Loge le 24 juin – Saint Jean d'été – 1717 par quatre Loges réunies à l'auberge de "L'oie et le Grill") et susciteront un tel tollé dans les Loges anciennes, que dès 1736, elles furent largement amendées. La querelle des Ancients et des Moderns durera jusqu'à l'Act of Union de 1813 qui, en fait, pour une large part, donna raison aux Ancients. Cela s'explique par le fait que les Loges londoniennes, après avoir été grandement en vogue auprès de la noblesse et de la haute bourgeoisie finirent par lasser, peu à peu, tout au long du 18ème siècle et périclitaient, alors que les Loges des Ancients continuaient sur leur lancée.

 

La suite, on la connaît …

 

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