Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Dieu et la science.

Réflexions à la lecture du hors-série "Dieu et la science du "Point.

La Foi spirituelle est traduite en croyances religieuses afin de la rendre accessible au peuple et d'asseoir, sur lui, le pouvoir des prêtres.

 

*

 

 Galileo Galilei exaspéré par les attaques de l'Église contre Copernic (1473-1543) s'exprime en 1615 :

 

"Contentez-vous de nous dire comment on va au ciel

et laissez-nous le soin de vous dire comment va le ciel."

 

La différence est essentielle entre le "comment" (la physique) et le "pour quoi" (la métaphysique). Le pont entre ces deux berges de la pensée est l'affaire de la cosmologie.

 

*

 

Du Jésuite François Euvé interrogé par Laurence Moreau ("Le Point") :

 

"On dit que la religion est un discours, et la science une méthode. Au XXIe siècle, la méthode n'a-t-elle pas étouffé le discours ?

 

Quand on aborde la question de l'humain, les scientifiques n'ont pas plus la réponse que d'autres et, en matière d'éthique, ils font appel aux philosophes et aux théologiens. Certes, Dieu s'est fait plus discret. Mais cela ne veut pas dire qu'il n'est pas là. Il se retire, en quelque sorte, du fonctionnement du monde pour laisser les hommes agir librement. "

 

Le Dieu des religions (et des théologiens) ne se fait pas discret ; il est mort ! Et l'humain n'est en rien distinguable des autres manifestations physiques.

Il n'existe aucune dualité ontique ni dans le Réel, ni dans l'humain qui est intégralement partie prenante de ce Réel qu'il ne fait que manifester.

 

Il faut urgemment clamer que la science a, depuis le début le 20ème siècle, largement dépassé le mécanicisme analytique, réductionniste et déterministe du 19ème siècle machiniste et positiviste.

Le cœur de la science (de la cosmologie) actuelle est le panlogisme (Logicité), l'intentionnalisme (Intentionnalité), l'accumulationnisme (Corporalité) et le thermodynamicisme (Constructivité).

 

Ni le Divin, ni l'âme humaine ne sont hors du Réel-Un qui inclut tout.

Le Divin, c'est le Cosmos, c'est le Logos cosmique, c'est la Logicité cosmique, c'est le Grand Architecte de l'Univers, c'est l'Âme cosmique, c'est cette Anima cosmique qui anime tout (y compris l'humain dont l'âme personnelle n'est que le reflet éphémère, infime et local de cette Âme cosmique), c'est l'Intention cosmique d'accomplissement en plénitude qui habite tout ce qui existe.

 

Comme Nietzsche l'avait prévu, le Dieu des religions est mort.

Mais le Divin de la spiritualité panenthéiste est en pleine émergence.

Ce Divin est le "Dieu" d'Héraclite d'Ephèse, de Zénon de Kition, d'Eckart von Hochheim, de Baroukh Spinoza, de Georg-Wilhem Hegel, d'Albert Einstein, de Teilhard de Chardin, d'Alfred Whitehead, … ; il est le "Dieu" de la Kabbale (le Eyn-Sof), du Taoïsme (le Tao), du Vedanta-advaïta (le Brahman), …

 

*

 

Le big-bang n'exprime pas du tout la "naissance de l'univers", mais bien l'émergence de la matière protéique, dans les noyaux galactiques, à partir de la prématière (qui est activité pure).

L'univers a toujours existé et existera toujours, mais il est le siège d'émergences successives, comme des "couches" inédites qui se superposent aux précédentes. Comme l'humain appartient intégralement à la "couche" matérielle, il a effectivement pu croire que la "naissance" de la matière indiquait la "naissance" de l'univers, ce qui est faux.

 

*

 

Il faut combattre tous les créationnismes au nom de l'émanationnisme.

 

*

 

On ne peut plus distinguer métaphysique (le "pour quoi") et physique (le "comment"), puisque le "comment" n'est que la réponse à un "pour quoi" (le cheminement répond à l'intention).

Autrement dit, la Constructivité cosmologique (les "lois" de l'univers, le constructionnisme naturel, l'évolutionnisme universel, les voies complémentaires de l'uniformité et de la complexité, etc …) n'est que la conséquence d'une Intentionnalité accomplissante, d'une Corporalité accumulative et d'une Logicité rationnelle.

 

*

 

Le thermodynamicisme doit dépasser, supplanter et remplacer le mécanicisme dans toutes les branches de la physique.

Ce thermodynamicisme, qui fonde la Constructivité et l'évolutionnisme cosmiques, impose une optimisation de la dissipation de toutes les tensions engendrées par les bipolarités fondamentales, selon les deux voies de l'uniformisation entropique et de la complexification néguentropique.

 

*

 

De Laurence Moreau ("Le Point") :

 

"D'où vient le monde ? Comment s'est-il construit ? Qui a créé l'homme et les animaux ? Et surtout dans quel but ? Depuis la nuit des temps, et quelle que soit sa civilisation, l'homme n'a cessé de s'inquiéter de son origine. Et, bien avant l'écriture, c'est d'abord aux mythes qu'il a confié le soin de lui raconter le film de la création. Ceux-ci sont multiples. Or, à quelques variantes près, quelle que soit la civilisation, ils évoquent les mêmes images de départ : le vide, le désordre, l'indistinct, l'inerte. Ce qui ne signifie pas le néant : pour les Anciens, le monde est vide tout en étant quelque chose. Pour les Germaniques et les Scandinaves, c'est un abîme sans fond, le Muspelheim. Pour les Égyptiens et les Sumériens, c'est un océan sans limite. C'est de cet espace primordial que serait née la matière. Chez les Indiens Cheyennes, l'oiseau qui conserve dans son bec un peu de vase permet au Grand Esprit de transformer l'étendue d'eau infinie en terre ferme. Chez les Dogons, une vibration produite par Amma le Créateur provoque l'éclatement de l'œuf cosmique et libère ainsi les forces opposées de l'ordre et du chaos.

Au XVIe siècle, le kabbaliste Isaac Louria (1534-1572) pense que l'Univers est né de la lumière, incarnation de Dieu. Pour le créer, Dieu a dû se rétracter pour lui laisser de la place, d'où le concept de tsimtsoum qui irrigue la mystique juive. Autant de traditions qui reposent sur le même constat : le monde naît du divin. Et ensuite ? Sauf exception, l'Univers en gestation est peuplé de monstres, loups ou aigles gigantesques chez les Germains, dragons immondes chez les Babyloniens, Titans et Cyclopes chez les Grecs. Le serpent est l'une des figures les plus répandues, notamment dans les mythes africains mais aussi en Mésopotamie. À Sumer, d'après le Poème de la création, c'est Tiamat, la vipère « à la dent aiguë et aux mâchoires impitoyables », qui est à l'origine du monde. Ses enfants se disputent avec tant de violence et si bruyamment qu'ils provoquent la colère de leur père, Apsou, lequel veut s'en débarrasser. Mais l'un de ses fils le tue pendant son sommeil : le meurtre familial est l'une des constantes des mythes fondateurs. Ainsi, chez les Grecs, si l'on en croit le récit que fait de la création de l'Univers Hésiode (VIIIe-VIIe siècles av. J.-C.) dans sa Théogonie, trois dieux se dégagent peu à peu du vide primordial appelé le chaos : Gaïa (la Terre), Ouranos (le ciel) et Éros (l'Amour). De l'union de Gaïa et d'Ouranos naissent les Titans et autres créatures fantastiques et turbulentes. Cronos, fils d'Ouranos, émascule son père devenu menaçant. Plus tard, par peur d'être lui-même victime d'un parricide, il dévore ses enfants jusqu'à ce que Zeus, le seul qui échappe au massacre, l'assassine à son tour. Commence alors une nouvelle phase de l'histoire du monde : l'intelligence et la sagesse fondent l'ordre. Si Zeus peut tuer Cronos, c'est qu'il est un rusé stratège. À Babylone, si Mardouk peut supprimer l'immonde Tiamat, c'est parce qu'il est « le dieu le plus capable et le plus sage », chante le Poème de la création.

Libérés des forces brutes, les « dieux sapiens » et leurs affidés peuvent organiser le ciel et la terre et préparer la venue de l'homme. Mardouk découpe Tiamat et utilise la moitié de son corps pour édifier la voûte céleste. Les dieux scandinaves Odin, Vili et Vé assassinent le premier être sorti de l'abîme, le géant Ymir. Les poèmes héroïques rassemblés dans l'Edda racontent qu'ils créent la terre avec sa chair et la mer avec son sang. Bientôt commencera le temps des hommes. En Grèce, le Titan Prométhée ose défier les dieux de l'Olympe pour donner aux hommes le feu, les techniques de l'élevage et de l'agriculture.

Il est toutefois une civilisation qui, selon certains experts, serait apparue vers le XXe siècle avant notre ère et qui dédaigne le récit trop simpliste d'une création monstrueuse née du chaos : c'est celle de l'Inde du Veda.

« Qui sait […], qui pourrait ici proclamer d'où est née, d'où vient cette création secondaire ? Les dieux sont nés après, par la création secondaire du monde. Mais qui sait d'où celle-ci elle-même est issue ? » s'interroge le Rig-Véda, poème sacré du védisme. Pour les penseurs indiens, le monde est né d'une volonté, celle de Prajâpati, le « Maître des créatures », qui, après une année de gestation dans un œuf d'or, tire l'Univers du néant par la seule force de sa parole.

Le langage est créateur. Le concept du Verbe, le logos, est né, dont les Grecs vont faire leur miel. Mais en Palestine comme à Babylone, où les Juifs ont été réduits en servitude, on écrit la Bible. Et là aussi la parole est reine. « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre. » Ainsi débute la Genèse, le récit biblique des premiers âges, qui raconte une gestation du monde en six jours, laquelle aboutit à la création de l'homme, touche finale d'une œuvre parfaite. Et qu'importe que, dans la même Bible, le Livre de Job, plus tardif que celui de la Genèse, ne fasse intervenir Dieu qu'après la conception du ciel et de la terre : « Par sa force, Dieu a calmé la mer, par son intelligence, écrasé Rahab […], sa main a transpercé le Serpent fuyard. » L'élite juive est alors exilée à Babylone et s'est imbibée des mythes de son oppresseur.

Au VIIe siècle après J.-C., l'islam, qui considère la Bible comme un livre fondateur, raconte avec une précision méticuleuse la création du monde : Allah créa la Terre le dimanche et le lundi ; le mardi, les montagnes ; le mercredi, les arbres, l'eau, les villes ; le jeudi, le ciel ; le vendredi, les étoiles, le soleil, la lune, les anges… et, à la dernière heure, enfin, Adam, l'homme. Merveille finale destinée à le célébrer en se soumettant à sa loi. Difficile, ensuite, d'admettre que la vie naît d'un trou noir et que l'homme descend du singe…

Dès le VIe siècle avant J.-C., pourtant, les mythes ont été mis à mal par des esprits étonnamment rationnels. Si les Babyloniens ont inventé l'astronomie pour observer les astres et mieux servir leurs dieux, si les Égyptiens ont, d'après Hérodote (Ve siècle av. J.-C.), posé les bases de la géométrie, si utile pour construire des pyramides, ces monuments en l'honneur de leurs dieux-rois, des Grecs, eux, ont cherché les principes premiers qui pourraient expliquer l'ordre de la nature. Ce sera l'eau, l'air, le feu, voire l'illimité ou, pour les disciples du mystérieux Pythagore (v. 580-v. 495 av. J.-C.), les nombres. Ces hommes s'appellent Thalès, Anaximandre, Anaximène, Héraclite, etc. Ce sont eux qui posent les premières pierres de la philosophie et de la science. Plus tard, les disciples de Démocrite (v. 460-v. 370 av. J.-C.) et d'Épicure (v. 341-270 av. J.-C.) seront convaincus que le monde (et l'homme) est constitué d'atomes. Quant à Aristote (384-322 av. J.-C.), esprit encyclopédique qui fait de l'observation et de la compréhension des lois de la nature son champ de bataille, il donnera une définition fondatrice de ce qu'est la science, avant qu'Euclide (IVe-IIIe siècle av. J.-C.) et Ptolémée (v. 90-v. 168) ne proposent une explication du monde qui s'imposera à l'Occident jusqu'au XVIe siècle. La science est en train de naître. Et les mythes de création ? Ils vont demeurer vivants, portés par la poésie et les livres sacrés. Quand la science balbutie, n'ont-ils pas toujours une réponse prête pour résoudre les énigmes ?"

 

Un tel article a le mérite de vulgariser l'histoire de la cosmogonie, malgré qu'il commette des erreurs (notamment sur le livre de la Genèse et la mystique lourianique).

Le risque qui y est pris, à notre époque de grandes ignorances et incultures, de rejet de la science et d'appétence pour les affabulations, est que les légendes antiques séduisent la masse des crétins et n'amplifient le dédain de la connaissance scientifique.

 

*

 

Même le plus obtus des créationnistes devrait comprendre qu'une "creatio ex nihilo" n'a aucun sens, est absurde ! Si Dieu crée le monde, alors il y a "creatio ex Deo", mais pas "ex nihilo", à moins de prétendre que Dieu et Rien sont synonymes et, donc, d'afficher un athéisme profond incompatible avec le créationnisme : comment un Dieu qui n'existe pas pourrait-il créer ce qui existe ?

Il est donc impérieux de jeter tous les créationnismes et tous les nihilismes aux orties et d'entrer dans des conceptions éternalistes, intentionnalistes et émanationnistes du Réel.

 

*

 

A la différence du Témoignage chrétien (Evangiles, Epitres, Apocalypse) qui en est obsédé, la Torah ne mentionne pas du tout la notion de Salut (ni sotériologie, ni eschatologie) ; elle ne parle que de l'Alliance entre les dix tribus d'Israël et leur Dieu YHWH.

Cette Alliance se présente sous la forme d'un contrat : en face d'une garantie de prospérité, de pérennité et de fécondité pour les Juifs, se pose l'obligation de respecter les 613 Mitzwot données à Moïse.

Il n'y a là qu'un pacte éthique, sans guère de métaphysique, que de la morale et non de la théologie.

Dieu, c'est ce qui parle par la bouche des prophètes et, d'abord, par celle de Moïse, le plus fameux d'entre eux.

Dieu n'est pas une personne ; il est un message.

Ce point est capital !

 

*

 

A propos du hors série du "Point" intitulé : "Dieu et la science" …

Toujours cette épouvantable et pénible confusion entre spiritualité (la quête et la question sans fin) et religion (les croyances et les réponses toutes faites).

La bonne question ne concerne pas "Dieu et la science", mais bien "les religions et la science". L'idée de Dieu n'a rien à faire là-dedans.

 

*

 

La science (et la spiritualité) veut comprendre le monde ; les religions veulent atteindre l'autre-monde.

Mais il n'y a pas d'autre-monde ; donc les religions sont des impasses.

Ne restent donc que la science et la spiritualité qui, elles, sont parfaitement compatibles et convergentes.

 

*

 

L'évolutionnisme (Lamarck, Darwin, Wegener, Einstein, Friedmann, Lemaître, …) a vraiment été la plus grande révolution intellectuelle et philosophique de l'histoire de l'humanité (bien préconçue par Héraclite d'Ephèse au 6ème siècle avant l'ère funeste, et reprise par Friedrich Nietzsche).

Il n'y a pas d'Être, il n'y a que du Devenir.

Il n'y a pas d'objets en soi, mais seulement des processus inter agissants.

Tout évolue. Tout est en création permanente. Tout est cause et effet de tout.

Et si tout évolue, cela signifie qu'il existe un intention immanente, naturelle, logique.

Tout est en quête d'accomplissement de soi et de l'autour de soi.

Et cette intention, c'est la meilleure définition de Dieu, du Divin, du Logos, …

Il n'y a pas de créateur ; mais il y a création perpétuelle avec, derrière, une Logicité, c'est-à-dire un moteur rationnel de créativité.

 

*

 

Je ne crois pas (croyances), mais je me fie (foi) à cette intuition que tout ce qui existe, est mû par une intention immanente d'accomplissement.

 

*

 

Quand donc les humains comprendront-ils que le mot "Dieu" est un mot vide, un mot bouche-trou, un signifiant sans signifié ? Quand donc verront-ils que le problème de l'existence de Dieu (ou pas) est un faux problème (le mot existe, mais il ne veut rien dire) ? Le seul vrai problème est celui de l'existence de ce qui est … et le "pour quoi" de cette existence.

Le mot "Dieu" est un mot-symbole ; il a des synonymes comme le mot "Inconnu", ou le mot "Transcendant" (c'est-à-dire au-delà de tous les mots, de toutes les idées, de tous les concepts) ou, selon mon ami Edgar Morin, comme le mot "Mystère".

"Dieu", c'est le mot-valise par excellence.

La tradition juive avait tout compris depuis longtemps : on n'y parle pas de Dieu, mais de YHWH, un mot imprononçable, qui n'a aucun sens et qui remplit toutes les fonctions philosophiques et intellectuelles que l'on veut.

Devant le buisson ardent (Ex.:3;14), Moïse qui entend une voix mystérieuse, lui demande son nom et la réponse est : "Je deviendrai ce que je deviendrai" ['Ehyèh asher 'èhyèh].

Cette réponse résume, en trois mots, toutes les découvertes de la physique de la complexité de ce 21ème siècle.

 

*

 

Toute religion est, avant tout, une idéologie morale que sa théologie tente d'étayer avec de la métaphysique ou de l'herméneutique de textes institués.

Le problème central des religions n'est pas "Dieu" (donc le "Vrai"), mais le "Bien".

 

*

 

Dans le "Phédon", Platon raconte la dernière nuit (imaginaire) de Socrate et déclare que celui-ci "s'est intéressé très jeune à l'étude de la Nature, mais qu'il s'en est détourné pour s'occuper des affaires humaines".

Ce passage du cosmocentrisme à l'anthropocentrisme définit bien la rupture socratique d'avec les présocratiques.

Il est plus que temps de faire le trajet inverse et d'acter l'insignifiance humains face au mystère et à la logicité du Cosmos.

 

*

 

Le Réel est le champ vivant (la Vie) d'une Constructivité sous la pression constante et simultanée d'une Intentionnalité (la Vocation accomplissante), d'une Logicité (la Raison intelligente) et d'une Corporalité (la Matière accumulative)

 

*

 

Dieu, c'est l'Esprit du Réel qui se pense lui-même dans une dialectique permanente entre Intentionnalité et Logicité.

 

*

 

La spiritualité, c'est la quête de la connaissance ultime dans une trialectique permanente entre le factuel, l'intuitionnel et le rationnel.

Le factuel alimente (corporalité).

L'intuitionnel imagine (intentionnalité).

Le rationnel ordonne (logicité).

 

*

 

Si la distinction entre métaphysique (le "pourquoi" et/ou le "pour quoi" du Réel) et physique (le "comment" du Réel) est souvent assez claire, celle entre cosmologie et théologie l'est souvent beaucoup moins.

L'étude du Réel pris comme un Tout ordonné (cosmologie avec Kosmos signifiant "ordre, harmonie") et l'étude de Dieu comme fondement ultime du Réel (théologie) pourraient s'identifier l'une à l'autre (au moins dans une conception moniste) ; mais, le plus souvent, la théologie s'éloigne de la cosmologie dès lors qu'elle se penche préférentiellement sur l'existence humaine, ses rapports au Divin et les règles morales qui devraient la gouverner.

 

La théologie implique toujours une dualité, voire un dualisme ontique, une différence de nature entre Dieu dans son monde, et le monde humain.

La cosmologie, même la plus spiritualiste ou la plus panenthéiste, se passe volontiers du mot "Dieu" (et donc de toute théologie) dès lors qu'elle tend à rendre compte du Réel un Tout-Un au-delà de toutes les différenciations existentielles.

 

*

 

Il existe, en Europe, trois cultures complémentaires.

La culture anglo-saxonne a le goût de l'individu (individualisme) et de l'expérimentation (pragmatisme).

La culture germanique a le goût de l'ordre (systématisme) et de l'efficacité (productivisme).

La culture latine a le goût du discours (verbalisme) et de la contestation (idéologisme).

 

*

 

Selon Isaac Newton, le monde …

 

"… n'a pu procéder que de la volonté et de la puissance d'un Être intelligent."

 

Volonté : Intentionnalité …

Puissance : Corporalité …

Intelligence : Logicité …

Processus ("procéder") : Constructivité …

 

Les quatre pôles du tétraèdre cosmologique y sont. Au-delà de sa géniale découverte de la gravitation universelle, l'alchimiste Newton avait déjà tout compris …

Il suffirait de remplacer le mot "Être" par le mot "Réel" et tout serait parfait.

 

*

 

Quelle étrange idée d'affirmer que le Soleil tourne autour de la Terre (géocentrisme) ou que la Terre tourne autour du Soleil (héliocentrisme).

Dans l'univers réel, tout bouge dans tous les sens et tout tourne autour de tout.

Tout mouvement est relatif par rapport au point d'observation.

Le problème n'est pas de savoir qui tourne autour de qui, mais de choisir le référentiel dans lequel l'expression mathématique des trajectoires est la plus simple (pour cela, il suffit de choisir comme centre du référentiel l'objet le plus gravifique ; ici, le Soleil).

Avec le choix héliocentrique, les trajectoires planétaires deviennent de simples ellipses alors qu'avec le choix géocentrique, ces trajectoires s'expriment de façon archi-compliquées.

C'est un choix de facilité mentale et non de vérité expérimentale.

 

*

 

Deux regards s'opposent : celui de l'anthropocentrisme qui voit le monde du point de vue de l'humain, et le cosmocentrisme qui voit l'humain du point de vue du monde.

Descartes est anthropocentrique.

Spinoza est cosmocentrique.

Tout démontre, aujourd'hui, que Descartes avait totalement tort.

 

*

 

Le mécanicisme de Descartes (qui pour échapper à ses faiblesses a été obligé d'introduire une dualité ontique entre le corps et l'âme, supposée d'une autre nature) a été partiellement adopté par Spinoza, mais clairement combattu par Pascal, Leibniz et Kant.

 

*

 

Dieu est un personnage mythique dont certaines légendes (dans les "textes sacré") ont fait leur personnage principal et principiel afin de pouvoir parler de l'indicible et de faire connaître l'inconnaissable. Bref : Dieu symbolise le fondement ultime de tout ce qui existe.

 

*

 

D'Albert Einstein au rabbin Goldstein :

 

"Je crois au Dieu de Spinoza qui se révèle dans l'harmonie du monde, pleine de logicité [lawfull], et non à, un Dieu qui se préoccupe du sort et des agissements des humains."

 

Comment pourrait-on sérieusement se fier (foi) à une autre vision du Réel ?

Mon Dieu, amplifiez la Foi et débarrassez-nous des croyances !

 

*

 

De Baroukh Spinoza :

 

"Tout ce qui se produit, se produit par la volonté et le décret éternel de Dieu."

 

De cet aphorisme, on a inféré que Spinoza était absolument déterministe. Il aurait donc écrit son "Ethique" pour rien puisque, tout étant déterminé, aucun choix éthique n'est plus possible.

En réalité, "la volonté et le décret de Dieu" peuvent évidemment décréter le don d'autonomie et de libre-détermination de soi pour tout ce qui existe. Si la Vie et l'Esprit peuvent exercer une certaine autonomie, c'est parce que c'est "la volonté et le décret du Dieu". C'est cela le pari cosmique de l'Alliance : Dieu veut aussi être accompli par les œuvres humaines, pour autant que ces œuvres soient en harmonie avec la Logicité du cosmos.

Le Tout et ses parties coopèrent dans l'œuvre d'accomplissement.

 

*

 

Newton, le premier, établit une dialectique (linéaire et proportionnelle) entre l'inertie intrinsèque et la force extrinsèque : entre la persistance de soi en tant que soi et l'influence de l'autre en tant qu'autre, entre individuation et intégration, entre dilution et concrétion, entre entropie et néguentropie, entre la partie et le Tout, entre l'humain et le Divin.

 

*

 

L'évolutionnisme, découvert par Lamarck (dont Erasmus Darwin, le grand-père de Charles, fut le disciple) contre Cuvier ; il a lui-même évolué, au 19ème siècle, sur deux voies parallèle : d'une part, le processus extrinsèque de la sélection naturelle des plus aptes (Charles Darwin) et, d'autre part, le processus intrinsèque des mutations chromosomiques (Gregor Mendel).

L'attribution de la naissance du concept évolutionniste à Charles Darwin est une contre-vérité historique.

Le darwinisme n'est pas l'évolutionnisme. Le darwinisme n'est rien de plus - ni de moins - que le mécanisme de la sélection naturelle qui, à bien des points de vue, est aujourd'hui plus que discutable : en effet, il s'inscrit dans une idéologie élisabéthaine de la lutte de chaque individu contre tous les autres, et occulte complètement les phénomènes connus de la solidarité et de la complémentarité sociales (comme dans une ruche d'abeilles, par exemple).

 

*

 

Le Témoignage chrétien (dit "Nouveau Testament") a été inséré de force dans la Bible hébraïque (dite "Ancien Testament").

Pourtant, ces deux ensembles de textes sont totalement incompatibles (même si l'on comprend qu'historiquement, la crédibilité du message chrétien passât par l'annexion de la mémoire juive "annonciatrice", au prétexte que le supposé Jésus et le très réel Paul fussent juifs, quoique renégats et complètement romanisés).

La Bible hébraïque est la bibliothèque fondatrice de la culture juive depuis la disparition des dix tribus, l'assimilation, par les judéens, des benjaminites, et la dissolution, postexilique, du lévitisme (la religion fondatrice portée par la tribu sacerdotale de Lévy et perpétuée dans le kabbalisme) dans le pharisaïsme, le rabbinisme et le talmudisme.

La Bible hébraïque est un caléidoscope où, par exemple, le messianisme d'Isaïe n'a rien à voir avec l'enseignement de Moïse (la Torah).

Mais, plus profondément, la Bible hébraïque est le panégyrique de l'Alliance avec le Divin qui est là, en nous et autour de nous, alors que le Témoignage chrétien est le promoteur du Salut dans un autre monde, après la mort.

 

*

 

Les religions et idéologies du Salut dans une autre-monde parallèle ou dans un nouveau-monde à venir sont toutes des absurdités sans nom. Il n'y a rien à sauver, à sauvegarder, à pérenniser, à préserver, à éterniser.

Le "je" doit s'éteindre.

Le "monde humain" doit s'éteindre.

Seuls l'Intention, la Matière, l'Esprit et la Vie, qui sont le Réel, sont intemporels.

 

*

 

Le temps n'est que le rapport entre la vitesse d'évolution d'un processus et la vitesse de propagation de la lumière dans le vide (qui est le processus le plus rapide possible).

Le temps est un rapport relatif, pas une mesure absolue.

 

*

 

L'avenir est éventuellement virtuel ou potentiel, mais, en aucun cas, réel (ce n'est donc pas la conscience humaine qui "parcourt" un univers déjà intégralement construit).

L'avenir se construit à chaque instant, dans le présent de chaque lieu et sous la pression de l'optimisation de la dissipation des tensions (Constructivité) induites par les trois piliers du Réel (Intentionnalité, Corporalité et Logicité). L'avenir se construit avec les ressources du passé qui, elles, s'accumulent sous le présent sous forme mémorielle (comme un mur se bâtit, couche après couche, sur base des strates déjà maçonnées).

 

*

 

D'Albert Einstein :

 

"Les génies religieux de tous les temps ont été distingués par cette religiosité cosmique qui ne connaît ni dogme ni Dieu pensé à l'image de l'homme.""

 

Panenthéisme, donc !

 

*

 

Il serait salutaire que des pitres comme Richard Dawkins, Jean-Pierre Changeux et autres mécanicistes obsolètes, soient jetés, au plus vite, dans les oubliettes de l'histoire scientifique.

La Vie ne se réduit pas aux molécules.

L'Esprit ne se réduit pas aux neurones.

 

*

 

Quand des continents entiers comme l'Angloland, l'Islamiland et l'Indoland (et le Sino land et d'autres pays, sans doute) s'opposent, au nom de leurs croyances surannées, à l'enseignement de l'évolutionnisme, on comprend que les idéologies et les religions, d'un côté, et la science, de l'autre, n'ont pas du tout réglé leur contentieux.

Ces continents archaïques sont toujours coincés dans la culture dualiste du Salut qui, toujours, met l'humain et la Nature sur des plans différents.

Tout cela est désespérant !

 

En revanche, la notion d'intelligent design qui met en avant une téléologie cosmique et une intentionnalité claire dans l'évolution du Réel, sans nécessairement passer par l'absurde idée d'un Dieu créateur, est une avancée intéressante pour réconcilier la science et la métaphysique dans une cosmologie complexe, ni mécaniciste, ni hasardiste.

Mais il faut y prendre garde car la notion d'intelligent design est souvent une "ruse" hypocrite des créationnistes …

 

*